Pour gagner et ne pas subir, apprenons à planifier !
Les évènements qui se succèdent et la manière dont ils sont traités, démontrent le manque de planification.
La planification est l’élaboration à froid des plans nécessaires à la gestion des évènements. La résolution au fil de l’eau des problèmes qui s’amoncèlent ne peut mener qu’à l’échec. Planifier, ce n’est pas remplir un planning et réunir des acteurs pour décider ce que l’on doit faire. Planifier, c’est apporter une vision stratégique d’ensemble pour élaborer les traitements des problématiques avant qu’elles ne surviennent, en rédigeant des plans détaillés.
Dans le cas de la pandémie que nous subissons actuellement, le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 évoquait comme menace possible à venir ce type d’évènement. Nous avions donc identifié dès au moins 2008 la possibilité d’une pandémie qui aurait des impacts particulièrement néfastes pour notre pays. Extrait du livre blanc, page 164 :
« Pandémie massive à forte létalité » :
« … La cinétique d’une pandémie à forte contagion et à forte létalité s’étendrait sur une durée de quelques semaines à quelques mois, en plusieurs vagues, qui seraient elles-mêmes espacées. Par son ampleur, sa durée, son extension géographique, son caractère indiscriminé, une telle crise est de nature à remettre en cause le fonctionnement normal de la vie nationale et des institutions. Les conséquences impliqueraient une mobilisation et une coordination élevées de moyens tant civils que militaires, nécessitant une planification aussi poussée que possible. Ce scénario aurait évidemment une importante dimension européenne et internationale. L’objectif premier étant d’éviter le développement pandémique, le premier volet de la stratégie porte sur la connaissance et l’anticipation et simultanément sur la prévention. Il comporte l’orientation du système de veille et d’alerte sanitaires, un effort continu de recherche, de développement et de production de produits de traitement, la planification de la vie nationale en situation de pandémie, la sensibilisation précoce de la population, la formation des intervenants et leur entraînement par des exercices, la constitution de stocks nationaux correspondant aux principaux risques sanitaires,…»
Ce constat étant fait, ceux qui manœuvraient le pays auraient dû planifier les réponses à cet évènement et y apporter des solutions concrètes, tels que la formation de médecins et d’infirmiers, la construction d’infrastructures hospitalières, le maintien d’un stock de masques ad–hoc, l’élaboration de schéma de contrôle de la population tel que le confinement, avec ou sans fermeture des écoles et universités, le maintien ou non de l’économie, la gestion des EPHAD, etc. Pour être efficace, tout cela aurait dû être réfléchi à froid, de manière dépassionnée, avec tous les acteurs impliqués.
La planification consiste succinctement à rédiger et détailler 3 ou 4 modes d’action et à les confronter méthodiquement, au sein d’une matrice décisionnelle, à 3 ou 4 types de pandémies possibles. On peut y ajouter des critères de sélection tels que : « vulnérabilité des générations à venir », « résilience de l’économie », « conséquence sur les hôpitaux », « maîtrise de la cohésion et du modèle social », « respect des croyances et de la spiritualité », « endurance morale de la population », etc… Mais on décide d’agir en réelle connaissance des conséquences qu’induiront nos décisions. Ensuite il faut rendre publics ces plans, et les expliquer, pour que chacun puisse être bien au courant des options possibles en fonction de la survenue des évènements. Cela permet d’impliquer l’ensemble des personnes concernées, et ainsi mettre en marche, de manière anticipée, l’intelligence collective. En somme, quand les citoyens sont au courant de ce qui peut leur arriver, alors ils anticipent longtemps à l’avance, et ne sont pas en colère en découvrant le jour-même pour le lendemain, les mesures qui sont prises pour gérer un évènement prévu de longue date.
Dans le cas présent, cela n’a pas été fait ni pour le risque de pandémie, ni pour une multitude d’autres sujets plus ou moins graves pour notre société. Par conséquent, nous ne gérons pas les crises mais nous les subissons.
Certes, il ne semblait pas y avoir de plan pandémie digne de ce nom et les décisions ante premier confinement n’ont pas permis de piloter la crise sereinement. Mais j’ai cependant l’intime conviction que des plans ont bien dû être élaborés il y a plusieurs années, mais qu’ils n’ont pas été appliqués à cette crise.
Là où le bât blesse c’est qu’en dépit du retour d’expérience de la première vague, les plans de la gestion de la deuxième vague n’ont pas été consolidés à froid, engendrant ce sentiment de flottement et d’amateurisme et donc de manque de considération.
Pour la troisième vague et les suivantes, ainsi que pour toutes les autres pandémies à venir (car oui, il y en aura d’autres, comme des attentats d’ailleurs !), nous devrions avoir des plans sur lesquels nous appuyer pour conduire ces crises en toute sérénité, avec la confiance réciproque indispensable au succès – confiance du chef vers son peuple et du peuple vers son chef – et surtout toute la considération mutuelle nécessaire au fonctionnement d’une société humaine.
Morale de cette histoire : Bien que nous formons en France de brillants cerveaux, nous nous évertuons à déposer des rustines sur des problèmes que nous semblons découvrir, alors que pour retrouver la confiance et la sérénité nous devrions planifier méthodiquement les réponses à tous ces défis identifiés de longue date par nos veilleurs stratégiques. Alors hâtons-nous pour planifier maintenant les nombreuses crises à venir !
Enfin, un plan n’est qu’un schéma intellectuel qui n’est jamais réalisé entièrement. Mais lors de la survenue de l’évènement, son existence permet de concentrer l’intelligence sur les seuls imprévus que les forces de réflexion rapide (FRR) doivent traiter, et ainsi accroître l’efficacité globale de notre organisation.